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Par Com FNDIRP
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Intervention à deux voix d’Alain Rivet, Président Délégué et de Jocelyne Martinet, Secrétaire Générale de la FNDIRP, prononcé lors des obsèques de notre amie et camarade Mireille Jourdan
Chère Liliane, Chère Nadine, Chers famille et amis de Mireille,
Dès que j’ai envisagé de parler ici aujourd’hui devant vous, j’ai pensé que je ne pouvais pas le faire seul. Rendre hommage à Mireille, militante infatigable de la FNDIRP, de la paix, de la fraternité, des droits de l’homme … et de la femme, de l’égalité des sexes, devait se faire dans ce cadre imposé par le respect que nous lui devons. Faire cet hommage au nom de la FNDIRP, fédération au sein de laquelle l’engagement féminin est majoritaire en confortait l’idée. Montrer à Mireille ici que la direction de la FNDIRP s’exprime pour elle dans la concorde, la cohésion et la solidarité, c’est aussi lui dire « Mireille, nous gardons ton cap ! ».
Je m’en suis ouvert à Jocelyne qui a tout de suite souscrit à l’idée et nous allons parler à deux voix mais d’une seule voix, celle de la FNDIRP.
Mireille, il y aurait tant à dire sur elle mais le temps imparti va nous contraindre à la concision.
Mireille vient de loin. Elle est née Lichnesky d’origine juive et russe. C’est son grand-père qui décide de quitter cette Russie des pogroms avec sa famille et un enfant à naître qui verra le jour en France et deviendra le papa de Mireille. Mireille est donc l’exemple de deuxième génération d’une immigration qui fait l’honneur, la beauté et la richesse de la France.
Mireille n’a pas toujours été mentonnaise, c’est son parcours de vie qui va l’y conduire.
Un parcours qui la confronte très jeune à la guerre de 1939-45.
Elle n’a que neuf ans lorsque ses petits pieds foulent les routes de l’exode en 1940. Elle sera marquée à vie par cette expérience, l’errance sans hygiène ni nourriture sous les avions et les bombes ennemis. Il faut se coucher sur les bas-côtés avec la mort qui frappe parfois à proximité. La petite fille quitte brutalement les rives de l’insouciance de l’enfance.
Mais cette fuite ne mène à rien, car l’ennemi envahisseur est plus rapide, elle tourne court. Il faut retourner à Paris où le logement a été pillé mais le pire est à venir à cause des origines juives. Alors, il faut porter l’étoile jaune et subir les privations et les humiliations. Si ses parents et elle parviennent à se cacher, une vingtaine de membres de la famille sera déportée et deux seulement rentreront.
Après l’exode à 9 ans, Mireille apprend, à 14 ans, l’existence des cham
bres à gaz, des fours crématoires et de l’extermination des juifs par les nazis.
Tous ces traumatismes de jeunesse nourriront aussi son militantisme futur.
Principalement pour des raisons de santé, elle arrive en 1970 à Menton avec deux enfants, deux filles, Nadine et Liliane, et fait face avec ce courage et cette force de caractère que vous lui connaissez tous.
Elle rencontre et épouse Aldo Jourdan, résistant déporté, passé par les centrale de Nîmes et d’Eysses avant de connaître la déportation à Dachau, Auschwitz-Birkenau, Mauthausen et Ebensee.
Aldo milite à la FNDIRP pour la Paix, la Liberté, la Fraternité , l’acquisition et la défense des droits des déportés et Mireille ne tardera pas à épouser aussi la cause et à accompagner Aldo pour faire vivre la mémoire de toutes les victimes de la deuxième guerre mondiale et, particulièrement, les combats et les sacrifices des résistants et des déportés.
En 1980, ils créent tous les deux le comité du Concours National de la Résistance et de la Déportation sur Menton, Monaco, Roquebrune-Cap-Martin, Sospel et Breil-sur-Roya. Ils vont dans les établissements scolaires porter le témoignage d’Aldo, inlassablement d’année en année.
En 1994, Aldo meurt mais Mireille surmontera courageusement le drame et s’investira plus encore, prenant le relais de son mari au sein de la section de Menton de la FNDIRP, devenant trésorière, secrétaire puis présidente en 1994. Parallèlement, son réseau s’étoffe : le musée de la Résistance de Nice, L’association des Anciens d’Eysses, l’ANACR et l’ACER. Elle est de plus en plus reconnue et appréciée en représentante départementale de la FNDIRP.
Son inaltérable engagement l’amène naturellement au secrétariat de l’association départementale de la FNDIRP, l’ADIRP 06, puis vice-présidente au côté d’Emile Gente, président auquel elle succède à son décès. Elle intègrera dans le même temps, sur proposition de l’ADIRP 06, le conseil d’administration de la FNDIRP puis le bureau Exécutif en 2012 dans lequel, vice-présidente, elle représente les veuves de déportés, attentive à la défense de leurs droits issus de leur mérite insuffisamment reconnu.
Nous nous sommes retrouvés côte-à-côte Mireille, Anita Baudouin et moi pour sauver la Fédération gravement menacée depuis quelques années mais surtout en 2012 et 2013. Nous étions tellement fiers et heureux de l’avoir sauvée et de la faire vivre jusqu’à aujourd’hui et, espérons-le, bien au-delà. Je l’ai connue à ce moment-là, ferme et combative mais toujours dans le respect et la tolérance, ouverte au dialogue.
Son œuvre principale, celle dont elle était la plus fière, reste la transmission aux jeunes et le CNRD.
Ses innombrables conférences dans les établissements scolaires pour apprendre aux élèves la tolérance, le respect des autres avec leurs différences, l’absolue nécessité d’éradiquer le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie, l’indispensable combat contre tous les totalitarismes, les valeurs de la République, de la Résistance et de la Déportation, le prix de la Liberté et de la Paix, la Laicité. Près de mille élèves par an pendant 40 ans ont reçu le message de Mireille, d’abord avec Aldo puis seule.
Comme Frania Haverland, dont Alain vous dira un mot tout à l’heure, elle était reconnue et remerciée bien des années après par des élèves devenues adultes dont elle avait éveillé, avec la complicité des enseignants, les consciences.
Pour le CNRD, elle était, en plus de ses interventions dans les collèges et lycées, une correctrice fidèle des devoirs dans son département et une grande pourvoyeuse de prix aux lauréats, prix pour lesquels elle s’approvisionnait en grandes quantités de livres et DVD auprès de notre Fédération.
Lors de notre dernière assemblée générale à Toulon en mai 2024 et malgré la maladie et les difficultés qu’elle rencontrait pour se déplacer elle se préoccupait déjà de l’organisation du prochain concours me confiant son intention d’intervenir auprès des collégiens et lycéens en visioconférence. Mireille, enfant d’immigrés, qui avait connu et subi les vicissitudes du XXième siècle demeurait malgré l’âge et la maladie une MILITANTE POUR LA ¨PAIX ENTRE LES PEUPLES »
Mireille était un de nos phares à la Fédération, pour éviter les écueils, fixer et ajuster le cap qu’il va nous falloir définir désormais sans elle.
Elle va beaucoup nous manquer mais sa mémoire nous guidera et son âme de militante vivra encore longtemps parmi nous.
J’ai eu la lourde tâche d’apprendre à Frania Haverland, ma coprésidente, déportée juive polonaise de 98 ans, passée par les ghettos de sa ville de Tarnow, les camps de Plaszow, Auschwitz-Birkenau, Flossenbürg et Theresienstadt, la disparition de Mireille. Elle m’a simplement dit « Je perds ma sœur » et elle a beaucoup pleuré. Et il est vrai que, l’une et l’autre se déplaçant difficilement ces dernières années, je suis souvent resté avec elles dîner dans l’hôtel qui nous hébergeait alors que la plupart allait dîner à l’extérieur. Et j’ai pu apprécier à chaque fois leur extraordinaire complicité d’une humanité attendrissante. Bien sûr, Frania est désolée que sa santé ne lui permette pas d’être parmi nous.
Si la FNDIRP pleure un de ses piliers, nous imaginons aussi combien d’enseignants se retrouvent orphelins et combien d’élèves le seront, à l’avenir, sans même le savoir. Chers enseignants, chers acteurs majeurs du CNRD, conservez Mireille dans vos cœurs et rendez-lui l’hommage qu’elle mérite en poursuivant en sa mémoire, avec la même conviction qu’elle, votre participation et votre engagement dans le CNRD. Son souhait le plus cher est là, nous en sommes certains.
Nous adressons, pour finir, notre soutien très amical et chaleureux à ses deux filles, à toute la famille et à ses nombreux amis.
Mireille, nous continuerons, sans toi désormais, à défendre les valeurs de la FNDIRP, comme tu as su si bien les porter durant toutes ces années.
Mireille était chevalier de la Légion d’Honneur et membre du Comité d’honneur de la FNDIRP.
Lien Communiqué de la FNDIRP : Mireille Jourdan nous a quittés
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